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Indemnisation au propriétaire en cas de refus d’expulsion

Mis à jour le
17/11/2025
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Sommaire

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      Depuis le 7 novembre 2025, les propriétaires bénéficient enfin d’un cadre juridique clair pour être indemnisés lorsque l’État refuse de prêter le concours de la force publique à une expulsion.

      Le Décret n° 2025-1052 du 3 novembre 2025, publié au Journal officiel et consultable sur Legifrance, fixe les règles de réparation financière due au propriétaire lorsque la préfecture retarde ou refuse l’intervention des forces de l’ordre pour exécuter une décision d’expulsion.

      En clair : si vous êtes propriétaire et que l’État bloque l’expulsion d’un occupant sans droit, vous pouvez désormais obtenir une indemnisation encadrée par la loi, avec un point de départ légal et une procédure administrative clairement définie.

      Le problème : quand le refus du concours public pénalisait les propriétaires

      Depuis plusieurs années, la multiplication des occupations illicites — communément appelées squats — a mis en évidence un vide juridique. Lorsqu’un propriétaire obtenait une décision d’expulsion devant le tribunal, son exécution nécessitait souvent le concours de la force publique, c’est-à-dire l’intervention des forces de l’ordre.

      Mais dans de nombreux cas, le préfet refusait ce concours, par exemple :

      • pour des motifs d’ordre public,
      • en raison de la trêve hivernale,
      • par des considérations sociales liées à l’âge, à la situation familiale (présence d’enfants, handicap, vulnérabilité) ou à la situation financière de l’occupant,
      • ou tout simplement par manque de moyens.

      Conséquence : le propriétaire, pourtant en droit, voyait son bien occupé illégalement pendant plusieurs mois, sans possibilité d’agir ni garantie d’indemnisation. Jusqu’à présent, seule une action en responsabilité contre l’État pouvait être engagée, souvent longue, incertaine et coûteuse.

      Le nouveau décret : une procédure encadrée pour la réparation du préjudice

      Le Décret n° 2025-1052 du 3 novembre 2025 met en œuvre l’article 11 de la Loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite. Il définit le moment, la procédure et les catégories de préjudices ouvrant droit à réparation.

      Quand la responsabilité de l’État est engagée

      La responsabilité de l’État débute :

      • à la date du refus explicite du concours de la force publique,
      • ou, à défaut de réponse du préfet, deux mois après la demande d’intervention.

      Autrement dit, le silence de l’administration vaut refus, et marque le début de la période d’indemnisation.

      Comment obtenir l’indemnisation

      Pour être indemnisé, le propriétaire doit adresser une demande écrite au préfet, accompagnée de :

      Le préfet examine ensuite le dossier et statue sur le droit à indemnisation. En cas de désaccord, un recours administratif ou contentieux peut être formé.

      Quand la responsabilité prend fin

      La responsabilité de l’État cesse :

      • dès que le concours est accordé ou exécuté,
      • en cas de départ volontaire des occupants,
      • ou si la décision d’expulsion est annulée.

      Pour les bailleurs sociaux (HLM), cette responsabilité est suspendue pendant la mise en œuvre des protocoles de prévention des expulsions.

      Les catégories de préjudices indemnisables

      Le décret consacre plusieurs types de préjudices ouvrant droit à réparation, reflétant la diversité des pertes subies par les propriétaires :

      Catégories de préjudice Descriptions
      Perte des loyers et des charges Montant équivalent à la valeur locative du bien pendant la période de responsabilité de l'État.
      Frais de remise en état Coûts des dégradations subies et travaux nécessaires à la réhabilitation du logement.
      Frais de Commissaire de Justice Honoraires et frais liés aux démarches d’expulsion après la décision judiciaire.
      Perte de valeur vénale Préjudice lié à une vente désavantageuse ou à l’impossibilité temporaire de vendre le bien.
      Trouble dans les conditions d’existence Indemnisation du préjudice moral et du bouleversement subi par le propriétaire.

      Pourquoi ce décret change la donne pour les investisseurs locatifs

      Une sécurité juridique renforcée

      Ce texte réduit considérablement un des principaux risques du marché locatif : le blocage administratif d’une expulsion légitime. Désormais, la responsabilité de l’État est clairement définie, avec un processus standardisé et des délais identifiés.

      Un signal fort pour la rentabilité locative

      L’indemnisation des pertes de loyers, des frais de remise en état ou du préjudice moral permet de stabiliser les rendements locatifs et de rassurer les investisseurs face au risque de squat.

      Une meilleure prévisibilité du risque

      En rendant l’État partiellement responsable, le décret introduit une forme de mutualisation du risque d’occupation illicite. Les investisseurs — particuliers comme institutionnels — peuvent désormais intégrer cette garantie dans leur analyse de risque et leurs polices d’assurance.

      À retenir

      Points clés Détails
      Texte de référence Décret n° 2025-1052 du 3 novembre 2025
      Objet Réparation due au propriétaire en cas de refus du concours de la force publique
      Entrée en vigueur 7 novembre 2025
      Autorité compétente Préfet du département
      Durée de responsabilité Du refus explicite (ou silence > 2 mois) jusqu’à l’exécution effective
      Types de préjudices Loyers, frais, TEOM, valeur vénale, préjudice moral
      Impact pour les bailleurs Sécurité juridique accrue, compensation financière, stabilité du rendement locatif

      Conclusion

      Le Décret 2025-1052 constitue une avancée majeure pour la protection des propriétaires. Il offre un cadre légal précis pour indemniser les préjudices liés au refus de concours de la force publique, comblant un vide juridique qui fragilisait le droit de propriété.

      En fixant des règles claires, le gouvernement rétablit la confiance dans l’investissement locatif privé : le propriétaire redevient un acteur protégé, et le risque d’occupation illicite — dorénavant encadré et indemnisable — cesse d’être un angle mort du marché immobilier.

      Auteur
      Thomas Alazet
      Expert immobilier Manda
      Thomas Alazet, expert en immobilier depuis plus de 12 ans, guide particuliers et investisseurs dans leurs décisions stratégiques. Spécialisé dans la gestion locative et les tendances du marché, il propose des analyses claires et des conseils adaptés. Découvrez son expertise en optimisation de projets immobiliers et location de biens.
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